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Culture/Son festival, ses regrets, le pouvoir d’Abidjan, ses ambitions, son côté jardin, sa préférence pour Didi B: Les grandes confidences de Tiken Jah

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Tiken Jah veut à travers Africa reggae festival réaffirmer le leadership de la Côte d’Ivoire au niveau du reggae mondial. Ph DR
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Entre plateaux télé, émissions radio, conférence de presse, Tiken Jah s’est largement exprimé sur son actualité, ses opinions et son festival (Africa reggae festival) dont le lancement est marqué par deux spectacles au Palais de la Culture Bernard B. Dadié d’Abidjan-Treichville, dont l’un était prévu pour hier et à l’autre à l’Agora de Koumassi le vendredi prochain, 08 décembre 2023.

 

Se donnant pour mission de repositionner ou de réaffirmer le 2ème rang de la Côte d’Ivoire au panthéon des nations de reggae après la Jamaïque de Bob Marley et surtout de poursuivre le combat de l’unité africaine, Tiken Jah de retour à Abidjan depuis quelques jours, a officiellement lancé son festival dénommé Africa reggae festival. Un festival qui, à en croire son commissaire général, mettra sur scène à la fois de grands noms du reggae jamaïcain mais surtout africain avec la prétention de faire repérer des talents naissants dont la musique voyagera, à l’instar d’Alpha Blondy et lui, partout dans le monde. C’est dans le cadre de la campagne médiatique pour le festival dont la première édition est prévue pour 2024 que le ‘’descendant des Fakoly’’ s’est exprimé sur plusieurs médias. Nous avons choisi plusieurs morceaux de ses différentes sorties.

L’histoire d’Africa reggae festival

Se prononçant sur ses motivations pour la mise sur pied de l’Africa reggae festival, Tiken Jah révèle que c’est un vieux rêve qu’il caressait depuis longtemps de voir défiler sur une même scène à Abidjan plusieurs grands noms de la musique confirmant ainsi le 2ème rang mondial de la Côte d’Ivoire comme terre du reggae dans le monde. Malheureusement, fait-il savoir, alors qu’il était prêt à dérouler son festival, il sera appelé par l’ex-ministre et actuel ministre-gouverneur Moussa Dosso qui avait aussi mûri un festival, Aby reggae festival, de la même dimension. Finalement, c’est après constat de disparition de ce festival qu’il se mettra à peaufiner le sien. « C’est un vieux rêve. Il y a quelques années, j’avais décidé de faire ce festival donc je quitte le Mali et j’arrive à Abidjan mais je ne savais pas qu’il y avait un autre festival qui se préparait. J’arrive à Abidjan et le lendemain je reçois un appel du ministre Moussa Dosso, alors promoteur d’Aby reggae festival, et qui me fait savoir qu’il veut créer un festival. Du coup, j’ai mis mon dossier sous la table parce que pour moi, l’essentiel était d’avoir un festival reggae en Côte d’Ivoire. Cela m’importait peu que ce soit moi ou quelqu’un d’autre à la tête d’un tel festival. Malheureusement après deux éditions, le festival n’a pas pu continuer. Et moi en tant que l’une des porte-voix du reggae, un ambassadeur du reggae africain dans le monde, il me fallait organiser un festival en Côte d’Ivoire », témoigne-t-il insistant qu’Abidjan étant la 2ème capitale du reggae, il était inadmissible de ne pas avoir une telle plateforme. « L’objectif du festival est qu’à travers notre événement, nous puissions inviter les organisateurs de spectacles, les spécialistes du reggae, les éditeurs, les producteurs de telle sorte qu’ils puissent détecter des talents et que sur le plan international il n’y ait pas seulement que Kajeem, Alpha Blondy, Tiken Jah…mais que puissent éclore de nouveaux talents », soutient-il. C’est pourquoi, confie-t-il que pour ce festival, il a associé toutes les forces vives et les grandes voix du reggae ivoirien. « Pour ce festival, j’ai appelé tout le monde, Alpha Blondy, Kajeem, Spyrow, Naftaly…car je ne veux pas que cela soit mon festival mais le festival de tous pour qu’ensemble on construise quelque chose de plus grand », a-t-il dit. Et d’indiquer qu’en plus de l’unité africaine qu’il prône, l’un de ses plus grands challenges est d’arriver à inscrire le nom d’un artiste ivoirien voire africain dans le livre des Grammy Awards. « Notre reggae est certes présent aujourd’hui dans le monde mais les grands objectifs ne sont pas encore atteints car par exemple chaque année les jamaïcains sont nominés aux Grammy Awards nous non », a-t-il déploré soulignant que certes il a eu la chance d’être distingué aux Victoires de la musique qui est la plus haute distinction en France mais il lui manque le sésame américain.

Reggae et pouvoir

A en croire Tiken Jah, reggae et pouvoir ne font pas bon ménage. Pis, dira-t-il, tout artiste reggae qui fait le choix de défendre un pouvoir au détriment du peuple détruit sa carrière. « Le reggae est une musique contre-pouvoir et donc un reggaeman qui s’aligne avec le pouvoir ne fait plus le reggae. C’est comme une règle édictée par Bob Marley. Lorsqu’on s’aligne à un pouvoir, on neutralise sa carrière », indique-t-il martelant que « le reggae doit rester la voix des sans voix ». Et d’ajouter que « la promesse que le reggae a faite au peuple, c’est d’être aux côtés de ceux qui sont victimes d’injustice ». Pour lui, le reggae reste une musique qui plaît à tous mais dont le message dérange. C’est pourquoi déplore-t-il que les politiciens qui aiment le reggae dans l’opposition lui tournent le dos une fois au pouvoir. « Le reggae est négligé, je ne dirai pas combattu mais les gens n’aiment pas le message du reggae. En fait, ils aiment le reggae quand par exemple ils sont dans l’opposition mais une fois au pouvoir, ils ne l’aiment plus. Le reggae a toujours eu des problèmes avec ceux qui sont au pouvoir mais je pense que c’est la ligne tracée qu’il faut suivre », a-t-il fustigé. Pour le chanteur au quart de siècle de carrière, cette situation ne devrait pas décourager ses compères. « Le message du reggae ne doit pas changer », exhorte-t-il. Avec à son compteur cette année 90 concerts dans le monde en moins de neuf mois, Tiken Jah a du mal à comprendre qu’il n’ait toujours encore eu de reconnaissance nationale. « Je n’ai jamais eu de décoration dans mon pays. Je n’ai pas de déclaration particulière à faire par rapport à cette situation. Je n’ai pas non plus de demande à faire dans ce sens. Mais je pense que ce sont des choses qui doivent se faire automatiquement en fonction de ce que l’artiste ou l’homme apporte à son pays. Quelqu’un qui fait 90 concerts dans tout ce temps, qui tourne partout et qui a le respect du public, je pense que c’est la meilleure décoration. Peut-être qu’un jour ça viendra mais quand les choses sont naturelles, c’est mieux », a-t-il traduit. S’il sait que cette situation de non-reconnaissance de son pays à son endroit n’est pas normale, il ne se dit tout de même pas étonné ou surpris. « Depuis Bob Marley, le reggae est la voix des sans voix et a décidé de prendre position pour le peuple. Mais ce n’est pas étonnant parce que du vivant de Bob Marley, il n’a pas été décoré en Jamaïque parce que le reggae est une musique contre-pouvoir », a-t-il justifié. Sur le report de son concert du dimanche 02 janvier 2022 au Rond-point d’Abobo, Tiken Jah ne veut pas en faire une histoire et ose croire que c’est bien parce qu’il n’avait pas eu toutes les autorisations mais ses deux concerts à venir, il dit avoir pris toutes les dispositions. « C’était chaud, le reggae est une musique qui fait peur. Cette fois-ci on a toutes les autorisations », a-t-il répondu.

Sur les situations au Mali, au Niger et au Burkina

Il dit saluer l’alliance entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Un rapprochement de ses ex-membres du G5 Sahel qui s’explique selon lui par leurs ambitions communes de mettre fin au terrorisme dans leurs pays. Là où déplorera-t-il, pendant plus d’une décennie des forces étrangères présentes dans ces pays n’ont pu faire grand-chose. « C’est une bonne chose que le Mali, le Burkina Faso, le Niger se rapprochent aujourd’hui pour combattre le terrorisme. Je salue cette alliance », a-t-il confié non sans justifier que « c’est le combat pour la nouvelle indépendance ». Et pour cette indépendance souhaite-t-il voir la Côte d’Ivoire soutenir ces trois pays. « Je souhaite que la Côte d’Ivoire voire tous les pays africains s’associent à eux pour lutter contre le terrorisme », a-t-il proposé. Il défend aussi son mutisme depuis un certain temps face aux problèmes que connaissent certains pays africains par le fait que « l’Afrique a trop de porte-paroles aujourd’hui » mais dit réagir seulement « quand c’est vraiment serré ».

Côté jardin

Père de sept enfants dont quatre filles et trois garçons, il se réjouit d’avoir eu son premier môme à l’âge de 19 ans. Car aujourd’hui, il dit être heureux d’être grand-père quatre fois déjà surtout que sa première petite-fille a 14 ans cette année. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles dit-il encourager les jeunes «qui ont peu de moyens à vite se marier pour qu’ils voient leurs enfants ». Malgré le temps et les circonstances de sa séparation d’avec Tata, sa défunte compagne de galère, il n’a jamais cessé de la porter dans son cœur. Toute chose qui lui a valu de lui dédier une chanson ‘’Tata’’. Même si la lecture n’est pas son dada, Tiken Jah raffole de deux plats dont un malien et le djoumgblé en Côte d’Ivoire. Côté musical en Côte d’Ivoire, il aime « beaucoup le rap ivoirien parce que ça ne parle pas d’armes contrairement à celui des Américains ». Il est aussi fier de Didi B, Primud d’or 2023 et aujourd’hui figure de proue du Rap Ivoire. « Quand je vois Didi Bi chanter, je suis fier », confie-t-il. Rasta, il se considère certes mais ne pratique pas l’église rasta.

 

Philip KLA

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