Ces meubles, véritables objets d’art écologique, sont l’œuvre de Kamagaté Bafétégue. A Yopougon, dans son antre, un atelier quelque peu modeste, il est plus connu sous le pseudonyme de Kazo nature. Mais, l’écho retentissant de son travail remarquable, le précède partout en Côte d’Ivoire et bien au-delà. Kazo s’est engagé dans une mission, celle de donner aux pneus usés, aux vieilles barriques ou encore aux gentes de motos et vélos abandonnées dans les rues, une seconde vie. Chose qu’il réussit plutôt bien. Au-delà de l’aspect lucratif, généré par la vente de ces œuvres, Kamagaté Bafétégue lutte à son échelle, contre l’insalubrité, les déchets plastiques, afin de contribuer à la préservation de l’environnement et au développement durable.
Son initiative fait écho, les images de ses réalisations pullulent la toile, jusqu’à susciter l’attention des pouvoirs publics, notamment le ministère de la Salubrité et de l’assainissement, qui décide de lui apporter son soutien, il y a quelques années. Cela s’est traduit par une visite, de la ministre Anne Désirée Ouloto, dans son atelier lors de la journée internationale du recyclage en 2017. Kazo bénéficie alors d’une aide pécuniaire. Dans la foulée, il reçoit le premier prix de la meilleure initiative individuelle en matière de recyclage de déchets du ministère de la salubrité et de l’assainissement. Pour couronner le tout, il décroche le prix africain des professionnels de la RSE et du développement durable aux RSE Awards, catégorie innovation. Grâce à son engagement à sauver la planète à travers ces concepts, Kamagaté Bafétégue voit ses efforts reconnus.
Une idée lumineuse pour préserver l’environnement
Tout commence véritablement en 2016, année au cours de laquelle l’idée brillante de fabriquer des meubles à partir d’objets recyclés, notamment des pneus, lui vient en tête de façon lumineuse. Dans les médias, l’artiste a laissé entendre que le déclic lui est venu de la rencontre avec un menuisier. En effet, selon lui, ce dernier essayait de faire des poufs et en observant la forme ronde qu'il s’efforçait à donner à ceux-ci, il a tout de suite pensé aux pneus qui traînaient dans ledit atelier. « Pourquoi se donner tant de mal à faire ces formes quand j’ai le même format avec ce pneu ? J’ai eu tout de suite l’idée d’en faire des fauteuils. À chaque fois que mon meuble prenait forme, je demandais l’avis de mon entourage qui a trouvé l’idée géniale », révélait-il. Chemin faisant, il comprend et mesure la portée de l’idée qu’il vient d’avoir, d’autant plus qu’elle lui permet à la fois de débarrasser son environnement des pneus usés qui gardent les eaux usées, et aussi de vivre des revenus de ces œuvres.
Pour lui, « ces pneus déversés un peu partout, bouchent les canalisations lorsqu’il pleut. Alors, les ramasser pour les transformer, c’est contribuer à la préservation de l’environnement ». Ce qui l'a encouragé à continuer, dit-il, ce sont les retours positifs sur ses créations. Voilà comment Kazo abandonne son métier de technicien laboratoire photo pour se consacrer entièrement à sa nouvelle passion. Sa clientèle est diversifiée, dit-il : « elle est assez large et issue des différentes couches sociales ». 7 ans après ses premières créations, l’artiste s’est bonifié, au point de diversifier ses œuvres. « En plus du concept des pneus, j’ai introduit le concept des barriques », nous apprend-il. « On sait tous ce à quoi servent les barriques, et l’utilisation qu’on en fait chez nous en Côte d’Ivoire. Lorsqu’elles sont usées et perforées, elles sont utilisées pour braiser la viande, ou fumer du poisson. Après, c’est dans les rues qu’elles se retrouvent.
Des concepts nouveaux pour lutter contre les déchets
L’idée, c’est de les récupérer, et de les transformer en fauteuils, chaises et autres meubles », explique Kazo. Et d’ajouter : « depuis que j’ai initié le concept, les barriques deviennent de plus en plus rares. Même usées, elles sont vendues, ce qui rend leur collecte moins aisée ». Ce qui fait dire notre artiste que « le concept des chaises et fauteuils avec les pneus, contribue à faire baisser le nombre de pneus usés dans les rues ». « J’ai ajouté à mes objets recyclés, les gentes de motos et de vélos. Ce sont des choses qui sont jetées dans les rues, mais avec l’idée que j’ai eue, je pense qu’ils peuvent servir à la décoration », renchérit Kazo. Tous ces concepts que je mets en œuvre, souligne-t-il, « ne sont rien d’autre que ma façon de contribuer à lutter contre l’insalubrité, les déchets, le réchauffement climatique, en vue de contribuer au développement durable.
Je pense qu’il faut être discipliné dans tout et surtout dans la préservation de notre environnement. Il est tout à fait inadmissible de jeter ce genre de déchets dans les rues. Il faut qu’on prenne conscience »! Aux populations, il leur demande de veiller sur la planète « en arrêtant de polluer l’environnement, et surtout, en arrêtant de jeter les ordures dans les rues. Nous polluons les cours d’eau, la lagune avec du plastique. Il faut que nous soyons tous des éco-citoyens responsables. Nous devons mener des actions dans le but de nettoyer les rues de nos quartiers ». Les jeunes, il les exhorte à mettre leur savoir-faire au service de la Nation, notamment de l’environnement, pour aider à sauver la planète.
Manuel Zako