Société

Interview/Zadi Gnagna (syndicaliste) : « Le Président Ouattara a fait beaucoup pour les fonctionnaires »

interview-zadi-gnagna-syndicaliste-le-president-ouattara-a-fait-beaucoup-pour-les-fonctionnaires
PARTAGEZ

Signée le 17 août 2017 entre le gouvernement ivoirien et les organisations syndicales, la trêve sociale prend fin dans quelques mois.  Zadi Gnagna Théodore, Président de la plateforme nationale des fonctionnaires et agents de l’État de Côte d’Ivoire, dresse le bilan de la mise en œuvre de cette trêve et n’exclut pas la possibilité d’une nouvelle signature avec le gouvernement.

 

C’est dans quelques mois, la fin de la trêve sociale. Où en êtes-vous, 5 ans après sa signature ?

Souvent, les gens mettent l’accent uniquement sur la trêve sociale, mais ce qu’il faut noter dans l’ensemble, ce sont nos revendications. Nous sommes dans la 5e année de la mise en œuvre des 5 points acquis de la lutte de 2017. Comme bilan, on peut dire que tout se passe bien. Au niveau des points concernant la retraite, des réformes ont été faites, même s’il reste encore des choses à faire. Dans l’ensemble, on peut dire que 85% de points de revendications ont été pris en compte. Au niveau du stock des arriérés, ça été un grand succès. Sur les 120 000 fonctionnaires de départ, il reste 58 000. Cette année, on doit évacuer 40 000 et il va rester 18 000. Nous félicitons le gouvernement et tous ceux qui ont travaillé pour qu’on aboutisse à cet accord. C’est la même chose pour tous les autres points.

 

Et la trêve sociale ?

Au niveau de la trêve, en tant que situation d’apaisement générale, je pense que s’agissant des huit signataires principaux, on peut dire globalement que même si nous avons connu des grèves sectorielles en 2018, 2019 et tout récemment, le bilan est bon dans l’ensemble. Nous avons tiré aussi les leçons de ce qui n’a pas marché.

 

Certains acteurs estiment que la trêve sociale a été un échec, en témoignent les différentes grèves sectorielles. Que répondez-vous ?  

Quand on ne participe pas à une négociation et qu’on ne connaît ni l’esprit, ni la lettre d’un accord, on peut se permettre de dire de loin, que c’est un échec. Mais pour nous qui y avons participé, la trêve sociale est bel et bien un succès. Le gouvernement s’est engagé à apurer les dettes et à augmenter des salaires à hauteur de 300 milliards FCFA. Qu’on me dise en Côte d’Ivoire, quelle est la lutte syndicale qui a abouti à un tel montant, dont 240 milliards uniquement pour le stock des arriérés. 11 milliards pour les bonifications indiciaires, 20 milliards pour la retraite, 1 milliard pour l’intégration des journaliers. Tout cela est payé normalement. Deuxième chose que certains ignorent, c’est que cet accord s’appuie sur la grève générale. Les grèves sectorielles sont légion en Côte d’Ivoire. Mais l’élément nouveau en 2017, c’est qu’il y a eu une grève générale qui a paralysé tout le système et le gouvernement ne veut plus revivre cette situation. Sur ce plan, il n’y a pas encore eu de grève générale depuis la signature de la trêve.

 

Ces grèves sectorielles ne sont-elles pas un peu de trop, puisque vous dites que le gouvernement respecte ces engagements ?

Effectivement, ces grèves sectorielles peuvent être analysées de deux manières. Premièrement, la volonté de certains acteurs de faire échouer l’accord. Des gens se sont organisés pour détruire ce que nous avons construit. Ce sont ces personnes qui voulaient devenir des acteurs nouveaux pour nous remplacer qui disent que la trêve est un échec.  Mais si tel était le cas, le gouvernement allait arrêter de payer. Mais ils ont échoué et le gouvernement a été très dur. Le deuxième aspect que nous pouvons considérer comme un échec, c’est que des centrales syndicales traditionnelles ont signé l’accord, mais n’ont rien fait pour que leur syndicat de base respecte ledit accord. Leur responsabilité était de faire descendre la signature dans la base. Bien au contraire, elles ont soutenu ces mouvements de grève. Autre chose importante à souligner, c’est que certains ministres dans le gouvernement avaient une arrière-pensée.

 

Des ministres, comment et pour quel intérêt ?

Cet accord devrait détruire la plateforme des fonctionnaires et agents de l’État en nous jetant en pâture, en n’accompagnant pas les structures qui ont signé. Les gens ont fait croire que les organisations signataires ont eu des milliards, mais cela est faux. On devrait effectivement bénéficier de l’aide pour communiquer à la base, les tenants et les aboutissants de cette signature. Nous n’avons eu aucun soutien. Nous sommes passés de faitière à centrale syndicale sur la base d’un travail technique qui a été fait par le ministère technique. Au bout de ce processus qui a duré 2 ans, nous avons été déclarés centrale syndicale avec un arrêté à l’appui. Mais, qu’est-ce qu’on constate, nous ne sommes pas appelés aux grandes rencontres des centrales.

 

Comment l’expliquez-vous ?

L’objectif était de nous humilier, nous piétiner et nous amener à nous rebeller. Mais nous sommes restés sereins et constants dans notre signature. Au contraire, la plateforme s’est renforcée.

 

Revenons sur la trêve sociale. La Coalition secteur éducation (COSEFCI) vous accuse de travailler pour la signature d’une nouvelle trêve sociale ?

Qu’est-ce qu’ils veulent ? C’est un procès en sorcellerie et ce sont toujours les mêmes qui n’apportent rien. Mais, ils sont prêts à vilipender les autres. Je n’ai jamais vu des syndicalistes qui créent des syndicats contre d’autres syndicalistes. Je ne réponds pas aux camarades par personne interposée, mais ils doivent dire ce qu’ils veulent. Nous avons aujourd’hui 15 revendications transversales qui sont sur la table du gouvernement. Au plan sectoriel, le gouvernement a permis que dans chaque ministère, les gens s’organisent pour dresser tout ce qu’ils veulent comme revendications. Cela n’a jamais été fait en Côte d’Ivoire. Je veux dire sans grève, le gouvernement crée les conditions pour recenser les dossiers qui étaient cachés. C’est un changement de paradigme. Cela est dû au travail que nous avons fait depuis 2017.

 

En clair, êtes-vous prêts à signer une nouvelle trêve sociale si le gouvernement en fait la demande ?

Mais j’ai des revendications. La trêve sociale a été faite par rapport à quelque chose. La paix sociale vient toujours d’une satisfaction. Il y a déjà une paix naturelle, maintenant, si cette paix doit se consolider par une signature, nous n’y sommes pas opposés. Le gouvernement a ses revendications, moi également, j’ai les miennes. Mon rôle n’est pas de dire au gouvernement, je ne veux pas de tes revendications. Si je le dis, le gouvernement va se braquer contre mes revendications. S’il y a un chemin que je peux emprunter pour éviter une crise avec l’État, je vais l’emprunter pour atteindre mon résultat.

 

Dans vos revendications, vous sollicitez l’obtention d’un 13e mois pour les fonctionnaires. N’est-ce pas de trop, vu que le gouvernement a des contraintes par rapport à la masse salariale ?

C’est vrai que les conditions des fonctionnaires se sont améliorées, mais on en demande un peu plus et cela n’est pas typique à nous. C’est dans le monde entier. Nous sommes aux portes d’une nouvelle discussion, nous demandons un 13e mois dont l’obtention serait historique. Et cela viendrait s’ajouter aux nombreux acquis obtenus grâce au Président Alassane Ouattara. Au plan social, le Président Alassane Ouattara a fait beaucoup pour les fonctionnaires. Mais cela n’est pas toujours suffisamment. Nous demandons le 13e mois parce que nous savons qu’il peut donner.

 

Réalisée par Ernest Famin

Newsletter
Inscrivez-vous à notre lettre d'information

Inscrivez-vous et recevez chaque jour via email, nos actuaités à ne pas manquer !

Veuillez activer le javascript sur cette page pour pouvoir valider le formulaire