Que pèse vraiment Laurent Gbagbo aujourd’hui, 12 ans après son règne à la tête de la Côte d’Ivoire ? Peu après son retour de La Haye où il a été jugé, avant d’être acquitté pour sa responsabilité dans la crise postélectorale de 2010, l’ancien président ivoirien a clairement affiché son ambition de continuer à faire de la politique. Ambition bien légitime. Sauf que le « Woody Mama », à 77 ans, est résigné à se débrouiller avec une portion de son ancien système. Une galaxie dispersée en plusieurs morceaux… antagonistes.
En 2010, la candidature de Laurent Gbagbo avait été portée par La majorité présidentielle (LMP), un groupe (Une soixantaine !) de formations et mouvements politiques noyautés par son parti, le Front populaire ivoirien (FPI). Après sa chute, la LMP s’est effondrée comme un château de cartes. Le Cadre permanent de dialogue (CPD), proposé par le nouveau pouvoir d’Alassane Ouattara pour apaiser le climat politique, a mis en face, une opposition hétéroclite composée d’une douzaine de formations politiques, y compris le FPI ! Certains cadres, dont l’influent Mamadou Koulibaly, ont pris leur distance du FPI pour créer Liberté et démocratie pour la République (LIDER).
Pis, le FPI lui-même n’a pas tardé à entrer en crise. Alors que Laurent Gbagbo était face à la justice à la CPI, sa formation politique est restée divisée entre une aile légale amenée par le président Pascal Affi N’Guessan et une dissidence constituée de caciques de la formation politique… Beaucoup d’observateurs avaient espéré que cette crise prendrait fin avec un retour du président fondateur du parti au pays. Mais tous ont déchanté.
L’espoir déçu !
Le retour de Laurent Gbagbo a plutôt scellé la rupture, l’ancien chef de l’Etat ayant pris position contre le camp de Pascal Affi N’Guessan. « Aujourd’hui, je suis revenu de prison, il nous faut avancer. Je propose : laissons Affi avec l’enveloppe qu’il détient. Nous allons baptiser le FPI autrement. Nous allons continuer à lutter…décentralisation, industrialisation, les libertés. Le FPI, c’est nous. Nous allons changer de nom. C'est tout ! », tranchait, à la surprise générale, Laurent Gbagbo, le 9 octobre 2021 face à ses militants à Abidjan. Le 17 octobre, il crée le nouveau parti, le Parti des peuples africains-Cote d’Ivoire (PPA-CI). Et Laurent Gbagbo d’inviter les partis politiques et mouvements, qui se reconnaissent en lui, à le rejoindre, bien entendu après avoir dissous leurs formations ou mouvements politiques d’origine. Certains partis politiques, comme l’Union des nouvelles générations (UNG) de Stéphane Kipré, ont répondu à l’appel. Mais, d’autres, comme LIDER de Mamadou Koulibaly, le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP) de Charles Blé Goudé,… sont restés sourds à l’appel du président fondateur du PPA-CI.
De nouvelles scissions ont d’ailleurs, été observées. Le cas le plus édifiant, est celui de Simone Gbagbo, son épouse légale et ancienne compagnon de lutte. L’ancienne Première dame n’a pas accepté d’adhérer au nouveau parti de Laurent Gbagbo. Présidente d’honneur du Mouvement Générations capables, la native de Moossou, émancipée depuis le retour de Laurent Gbagbo, trace désormais, sa propre voie. Ainsi va la recomposition politique.
Ténin Bè Ousmane