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Côte d’Ivoire / Exclusif - « Il y avait trois (3) personnalités à travers Arafat» Selon un proche

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Abidjan, le vendredi 13 aout 2021 (lavenir.ci) - A l’occasion de la commémoration du deuxième anniversaire de décès de DJ Arafat, son conseiller juridique livre pour la première fois, des secrets sur l’héritage et les biens du président de la ‘’Chine’’. Interview…

Quel est le rôle du conseiller juridique auprès de DJ Arafat ?

Je suis effectivement le conseiller juridique de DJ Arafat depuis 2011 jusqu’à son décès. Nous avons deux pôles que sont le pôle juridique avec le notaire Me Kouamé Athanase qui est le notaire d’Arafat et de ses enfants. Il y a également le pôle d’avocats qui, en fonction des litiges ou la nature du contentieux juridique, était chargé de gérer les dossiers. Ce pôle était dirigé par Me Alain Bokola et il est toujours notre avocat. Mon principal rôle était de servir de canal entre ces éminents juristes et avocats et l’artiste. J’ai l’avantage d’être de la même génération que l’artiste, mais aussi d’être celui qui était proche de toutes les sensibilités musicales de l’artiste. Donc, c’était plus facile pour moi de traiter les dossiers en amont et de les transférer en aval à tous mes collaborateurs.

Pour toi qui as été si proche d’Arafat pendant près d’une décennie, quel genre de personne était-il ?

Il faut dire qu’il y avait trois (3) personnalités à travers Arafat. Le considérant comme un frère que j’appelais M. Houon Ange Didier, il s’agit-là de celui qui te confie ses dossiers juridiques et à qui tu dois faire le point sur l’évolution de ses activités. C’était quelqu’un qui regardait avec passion, tout ce qui le concernait. Il y avait aussi Didier pour qui j’étais un grand frère qui m’accordait un grand respect, eu égard au travail que je faisais et on échangeait sur beaucoup de choses. Ça n’arrivait pas tout le temps, mais quand l’occasion se présentait, il me disait certaines choses. C’était quelqu’un qui communiquait difficilement avec les gens, mais quand le feeling passe, tu as l’impression de le connaître depuis longtemps.  Et après, il y avait l’artiste DJ Arafat qui, avec ses caprices, pouvait demander à son juriste ou à n’importe qui de gérer sa sécurité. Et là, il s’agit de l’esprit Yôrôgang où on ne regarde pas ton titre, ni ton grade, tout le monde se met au service de l’artiste. Donc, il m’est arrivé, malgré ma petite corpulence, de faire la sécurité à Daloa, au Tchad et même au Canada. Quand c’est DJ Arafat, c’est réellement des caprices, des décisions de dernière minute. Voici un peu la complexité de l’homme.

Était-il facile ou aisé de travailler à ses côtés ?

Il faut le dire, on ne travaille pas avec Arafat comme on travaille avec une personnalité lambda. Il faut d’abord te dire que tu n’as pas de répit. Il faut faire de la veille, c’est-à-dire être prêt à tout moment à pouvoir donner des explications ou à pouvoir décanter une situation. Pour dire qu’il faut être en alerte maximale 24h/24. Il a dû m’appeler très souvent à des heures très tardives pour lui dicter des conduites à tenir.

« Il y avait trois (3) personnalités à travers Arafat »

DJ Arafat était également un artiste qui avait la réputation de quelqu’un qui ne respectait pas ses engagements, ses contrats…

Il faut ramener ce fait à plusieurs périodes de la carrière de l’artiste. Au début de sa carrière par exemple, comme c’est quelqu’un qui est entré dans le showbiz tout de suite avec un tube, le staff qu’il avait ne pouvait contrôler tout ce succès inattendu. Il y a donc eu des moments où certains membres de son staff se faisaient passer pour Arafat. Cela a été le cas avec son manager avec qui il y avait une forte ressemblance. On a dû tendre un traquenard à ce manager pour qu’il arrête de faire ça. Après, l’artiste est devenu très capricieux et donc, il encaissait des avances sur des cachets de spectacles et en fin de compte, il n’allait plus à la cérémonie. Puis, après Arafat imposait des conditions drastiques aux promoteurs lorsqu’il s’agissait de se rendre en Occident pour des prestations. Chez lui, c’était Business class Air France et rien d’autre. Et quand une telle condition n’est pas respectée, il ne bouge pas. L’autre erreur que les gens commettaient, c’était d’aller signer directement avec l’artiste sans passer par ses managers et son staff. Ce sont ces choses qui ont donné cette mauvaise image à l’artiste. Mais avec le temps, il a compris la nécessité d’être rangé et de respecter ses engagements. Et je pense que les trois dernières années de sa vie, Arafat respectait ses engagements. Dans la plupart du temps, lorsqu’il y avait un problème, c’était la faute au promoteur qui n’avait pas respecté ses engagements. Il lui arrivait même souvent de laisser son cachet au promoteur quand il sait que celui-ci est en difficultés.

« Il s’achetait des voitures de 50 millions de F Cfa pratiquement chaque année »

On s’imagine la fortune post-mortem de DJ Arafat, surtout qu’il était très sollicité et exigeait de très gros cachets….

Arafat avait des projets et certaines réalisations immobilières. Il avait, dira-t-on, des acquisitions immobilières. Malheureusement, c’est quelqu’un qui n’était pas patient. Il est assez spontané et donc, je le voyais mal à avoir la patience de chercher à construire sur une parcelle qu’on paie. Arafat avait un modèle de construction qu’il voulait. Il voulait avoir une grande parcelle sur laquelle il allait construire sa maison, un espace de spectacle et un village Arafat. On devait acquérir cette parcelle à Bingerville en bordure d’eau et le notaire Athanase Kouamé s’était même engagé à la préfinancer, vu que l’artiste avait signé dans une major. Sinon, le notaire lui avait proposé de lui acheter une maison issue d’une opération immobilière, mais Arafat avait refusé, car trouvant qu’elle était trop petite. Par exemple, son contrat avec le promoteur de sa ligne de vêtements Airfat stipulait qu’il devait avoir une maison dans le District d’Abidjan, ce qui n’a pas été respecté. Je sais qu’il avait également un contrat dans le temps avec Moov dont le cachet devait être remplacé par une maison. Pour dire que ce ne sont pas les possibilités d’avoir un toit qui ont manqué, mais c’était plutôt une question de volonté. Je pense qu’Arafat n’en voulait pas, parce que certains de ses concurrents et confrères artistes ont aujourd’hui au moins huit maisons à Abidjan. Sinon, il laisse à ses héritiers, ses enfants, un réel capital. Déjà, sa musique qui tourne toujours grâce aux membres de la Yôrôgang, les ‘’Chinois’’ et tous ses fans, sans compter sa mère et les mères de ses enfants. Toutes ces personnes permettent de toujours faire vivre l’artiste. Jusqu’à preuve du contraire, Arafat est le seul artiste ivoirien décédé qui continue à faire bouger l’industrie musicale. Arafat faisait aussi partie des artistes les plus bancables en Côte d’Ivoire. Et il ne laisse pas ses enfants sans rien. Il leur a laissé suffisamment de moyens pour pouvoir entamer une vie correcte.

« Carmen Sama avait des créanciers à ses trousses »

En dehors de l’héritage musical que laisse Arafat, quel autre bien a-t-il laissé à ses enfants ?

Il a laissé certes, des biens, mais il a aussi laissé des dettes. Donc, dans le patrimoine qu’il laisse, on compte à la fois des passifs et des actifs. Sinon, on sait tous que DJ Arafat, ce sont des parfums de luxe, des voitures, des appareils, un studio équipé… Mais, je suppose qu’on aurait voulu voir des comptes en banque garnis.

À combien s’évalue son passif ?

C’est vraiment compliqué de dire un montant. Sûrement, le notaire peut l’évaluer. Ce sont des informations assez confidentielles, mais je puis vous dire que ce passif est assez énorme. Dans notre pôle juridique, nous avons entrepris des négociations avec tous les créanciers d’Arafat. La plupart ont laissé tomber les créances. Même à un moment donné, Carmen Sama avait des créanciers à ses trousses qui lui réclamaient certaines choses. Cela s’est passé au temps fort des obsèques et même aujourd’hui, d’autres continuent à se signaler. Et comme Arafat n’a pas laissé une fortune, c’est compliqué pour nous de faire face à tout ce flux.

« Il a laissé certes, des biens, mais il a aussi laissé des dettes » 

Concrètement, en termes de liquidité, combien a été découvert sur les comptes de DJ Arafat après sa mort ?

Arafat brassait des milliards de F Cfa. De 2007 à 2019, Arafat a brassé des milliards. En termes de cachets, de contrats, ça s’évalue à des milliards. Il s’achetait des voitures de 50 millions de F Cfa pratiquement chaque année. Il a aussi beaucoup partagé. Pour ce qu’il avait dans ses comptes, ce sont des informations confidentielles, mais je puis vous rassurer qu’il y avait énormément de mouvements sur ses comptes.

« Arafat avait des projets et certaines réalisations immobilières »

Qu’en est-il de ses voitures, motos et autres biens, surtout que des vols avaient été signalés dans les premières heures de son décès ?

Les voitures et les motos avaient été déplacées au vu de l’affluence qu’il y avait au niveau de sa maison. Elles se sont retrouvées par la suite chez une autorité politique et au décès de cette personnalité, avec le notaire, nous avons fait le nécessaire. Après cela, notre démarche a consisté à chercher à savoir si ces voitures avaient été totalement soldées. Et là, il s’est avéré que certaines n’avaient pas totalement été soldées.

Et comment s’est terminé son contrat avec Universal, sa maison de disque ?

Universal était à la fois le dossier le plus simple et le plus complexe. Il y avait un manque criard de communication entre Universal et les représentants des ayants droit. Et on a fini par appeler un arbitrage du Burida. Dans notre entendement, Arafat avait rempli tous ses engagements et ses obligations contractuelles avec sa maison de disques. Mais Universal a estimé qu’eu égard au droit de la propriété intellectuelle, il pouvait toujours utiliser les œuvres d’Arafat pendant 99 ans. Ce que nous n’avons pas accepté. On a voulu que le Burida arbitre pour un dénouement à l’amiable. Je le dis parce que je suis aussi le juriste de Tenor et il y a des similitudes entre les deux dossiers. Tenor, je le rappelle, n’est plus en contrat avec Universal, mais la maison de disques prétend avoir encore un avenant avec lui. Depuis le 11 juin dernier, nous leur avons adressé une sommation afin qu’ils puissent nous remettre ledit avenant que l’artiste déclare ne pas avoir signé, mais jusqu’aujourd’hui, ils ne nous ont pas encore fourni ce document. Même depuis la maison de détention, Tenor continue de dire qu’il n’a signé aucun avenant avec Universal.

Il y a également eu des polémiques autour des enfants de DJ Arafat au point où on a du mal à savoir qui sont ses vrais enfants…

Ce sont ses enfants biologiques qu’il a toujours présentés publiquement. Certains peuvent certes, porter des noms d’autres personnes, mais ne pas se sentir concernés par cette paternité. Pour moi, il n’y a pas de polémiques à faire, car tous ceux qu’Arafat a présentés comme ses enfants, restent ses enfants. Que ce soient Lachoina, Ezéchiel,…tous, sont ses enfants, à moins qu’on nous présente un test de paternité qui prouve le contraire.

Dans la ferveur de la commémoration des deux ans de décès de DJ Arafat, on a aussi vu deux statues de l’artiste qui certainement seront bientôt installées à Abidjan…

La première statue métallique en bronze n’est pas encore exposée. Depuis le décès de DJ Arafat, nous avons toujours réclamé une immortalisation de l’artiste, à l’instar de la statue d’Ernesto Djédjé installée à l’Insaac. Dans ce sens, nous avons écrit aux autorités du pays et je puis vous dire que l’affaire se trouve actuellement sur la table du Conseil des ministres. L’objectif est que cette statue soit posée à un endroit que la mairie et le gouvernement auront voulu. On leur fera des propositions d’emplacement et ce sera aux autorités de juger si cela ne gêne pas la circulation. Notre objectif est que cette statue soit posée quelque part afin d’immortaliser Arafat. La 2e chose, on souhaiterait que la rue soit baptisée. C’est vrai que sur Google Map, c’est écrit ‘’Rue Arafat’’, mais on voudrait que ce soit institutionnalisé. La 3e chose, il s’agit de l’enseigne lumineuse télécommandée à l’énergie solaire qui a été posée. Il faut dire que ça marque l’évolution de notre orientation relative à l’artiste. Au début, c’était un fan qui avait déposé une pancarte en bois et son tee-shirt des obsèques. Par la suite, on a vu des fans qui sont venus spontanément pour arranger l’espace. On ne s’approprie pas l’espace, parce que c’est un espace qui appartient à toute la ‘’Chine’’.

Il y a une amie de l’artiste qui avait mis une première bâche avec la photo de l’artiste. Mais quand sur le site, des enfants ont commencé à se battre, à se chamailler, elle a retiré la pancarte, parce que cela engendrait beaucoup de choses.  Et on a senti le mal que les fans avaient, parce que c’est comme si on profanait une nouvelle fois le corps de l’artiste ou qu’il subissait un autre accident.  C’est ainsi que des structures organisées de fans ont décidé de se relayer pour poser des affiches.

Ma doléance, c’est que l’esplanade du Palais de la Culture puisse être baptisée du nom de DJ Arafat. Cela parce que de son vivant, Arafat a rempli plus de sept fois, le Palais de la Culture. Et même, la statue peut être là aussi.

Deux ans après sa mort, qu’en est-il de l’enquête ou du constat sur l’accident de DJ Arafat ?

Deux ans après, je le dis avec beaucoup d’amertume. Comme je l’ai déjà dit, je suis le juriste de Tenor. On a vu la célérité avec laquelle les autorités camerounaises ont pris Tenor dans son lit d’hôpital pour le conduire, pour sa propre sécurité, à New Bell en prison. Ici, il faut dire que le sujet Arafat était qualifié de sensible dans les premières heures, par la suite, on a vu qu’il a été profané également. Mais deux ans après, la personne qui a causé l’accident ne s’est pas encore manifesté auprès de la famille. Pas un coup de fil, ni un intermédiaire, encore moins un courrier, aucun signe de vie, pas un seul message, rien du tout. Aucun membre de la famille n’a jusque-là été approché, pourtant on voit dans la ville, celle qui été à la base de l’accident. C’est quand même un chef de famille, un chef d’entreprise, une icône de la musique qui est partie, mais il n’y a pas eu de mot de compassion. Fort de tout cela, on a dû relancer le dossier et je sais que des auditions ont été faites et je pense qu’elle n’échappera pas à la prison.

Vous avez dû avoir les résultats du constat alors ?

Nous sommes dans le secret de l’instruction. Le parquet d’Abidjan a été saisi depuis le décès. Le dossier a été scellé et il n’y a qu’un avocat qui peut y avoir droit. Toutefois, je puis rassurer que mon artiste n’était pas fautif. D’ailleurs, dans ce genre de situation, avant même de conclure l’enquête, la personne qui a commis un accident mortel est déférée à la Maca. C’est comme ça, à moins que la personne en question ne soit au-dessus de la loi, ce que je ne pense pas, étant donné que nous sommes dans un pays de droit. Les gens ont dû minimiser l’affaire, mais la famille attend qu’il y ait un procès et entendre la dame à la base de l’accident, afin de pouvoir faire son deuil. Arafat que je connais, là où il est, il bouge encore tant que cette question n’est pas réglée. C’est quelqu’un qui n’aimait pas la foutaise. Les responsabilités doivent être situées.

Philip KLA

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