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Mode/Industrie textile à l’ère du numérique : Les recettes de Fadilatou Damala

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La directrice générale et fondatrice de Fadi Wax, Fadilatou Damala, était face aux journalistes culturels le samedi 04 décembre 2021 à Biétry dans l’une de ses nouvelles galeries. À cette occasion, la femme entrepreneure qui a réussi à donner une nouvelle coloration et une valeur au wax, a livré ses recettes pour un meilleur développement de l’industrie textile à l’ère du numérique.

 

Après Safarel, Molare, Koné Dodo et Kerozen, l’Union des journalistes culturels de Côte d’Ivoire (UJOCCI) a tenu le 5ème numéro de sa tribune d’échanges et d’expression dédiée aux acteurs et promoteurs culturels, dénommée ‘’Les jeudis de l’UJOCCI’’. Ce numéro exceptionnel de cette tribune intervient dans un contexte rythmé par l’Assemblée générale élective que l’union tiendra le samedi 11 décembre 2021 à la Maison de la presse d’Abidjan-Plateau. Dame Fadilatou Damala, l’invitée de l’UJOCCI, a reçu à cette occasion, un tableau d’honneur des mains du président sortant et candidat à sa propre succession, Philip Kla. La diplômée de 37 ans en comptabilité ayant fait fortune dans le textile, a partagé avec les journalistes culturels, sa passion pour la mode et pour le textile, non sans donner ses recettes pour réussir dans cet univers fortement marqué par les hommes.

 

Fadi Wax à l’épreuve de l’entreprenariat féminin

 

Fadilatou Damala fait partie des modèles féminins ayant réussi dans l’entreprenariat. Avec persévérance, passion et abnégation, cette jeune dame, rentrée de l’Europe après ses études en comptabilité, va se lancer dans un univers autre que sa profession. Une aventure qui selon elle, n’a pas été facile. D’abord, elle a dû faire face au refus de ses parents qui la voyaient réussir dans la comptabilité. Ensuite, elle fera face à plusieurs échecs du fait de ses produits qui ont du mal à avoir l’adhésion de sa clientèle. Toutefois, elle ne baisse pas les bras. À force de persévérance et de foi en son projet, le déclic finira par arriver, alors qu’elle était sur le point de fermer boutique et abandonner son entreprise. « L’aventure a démarré en 2013. La marque a vu le jour sous le nom de Dayé Textile, une entreprise qui revendait du textile déjà connu de tous. Ensuite, l’idée m’est venue de retranscrire ces motifs dans de nouvelles matières afin de permettre à ma génération actuelle et future, de porter encore plus d’intérêt à ce motif traditionnel qui perdure dans le temps. Au début, ce n’était pas facile, puisqu’innover tarde à entrer dans les habitudes. Cela a pris du temps. Et, à un moment donné, j’ai failli abandonner. C’est quand j’ai voulu tout arrêter que le public a manifesté son intérêt pour ce que je fais », raconte-t-elle.

 

« J’ai fait beaucoup de sacrifices »

 

De toute cette expérience qui dure maintenant neuf ans, retiendra-t-elle que l’entreprenariat n’est pas facile. « L’entreprenariat n’est pas facile, car quand on investit, on a tendance à attendre des retours tout de suite », admet-elle, dévoilant que la patience est la meilleure vertu quand on veut réussir dans l’entreprenariat. « Quand j’ai lancé mon produit sur le marché, j’ai d’abord fait du porte-à-porte, ce qui m’a amenée à Lomé et à Accra. J’ai eu beaucoup de refus et de rejets. Ce sont seulement une ou deux personnes qui ont accepté de le prendre et le tester. Finalement, c’est deux ans après que le produit a fait un boom », a-t-elle témoigné. Pour elle, lorsqu’une femme se lance dans l’entreprenariat, surtout dans le textile, elle ne doit pas tout de suite être focalisée sur le gain ou la rentabilité. Mais laisser le temps à son produit de faire son chemin, avoir une bonne pénétration du marché. « Il faut laisser du temps à toute activité de s’étendre, de se faire connaitre et donner aussi le temps aux clients de s’approprier le produit et de s’y habituer. C’est la leçon que j’ai tirée de cette expérience. Dans mon cas, tout est parti du Nigeria où j’ai eu plusieurs commandes importantes. Les Nigérians ont trouvé mon produit assez original et j’ai pu avoir des commandes de plus de 200 pièces. C’était vraiment beaucoup pour une débutante comme moi », a-t-elle témoigné, soulignant que l’innovation est la clé de réussite dans l’industrie textile. « Il est important d’innover. J’ai baigné dans le monde du textile depuis l’enfance, mes parents sont commerçants. Disons, c’est une affaire d’héritage. Je voulais abandonner parce que le public ne percevait pas encore cette innovation dans le wax, d’où le désintérêt. Innover, développer une nouvelle marque, ce n’est pas évident, il faut du temps pour que le client se l’approprie », conseille-t-elle. Aux femmes qui veulent investir dans son domaine d’activité, elle recommande la passion. « C’était la passion qui me motivait. On entreprend certes, pour de l’argent, mais pas que pour ça. Pour réussir, il faut être passionné et je l’étais. À chaque fois que j’essayais une méthode qu’elle ne prenait pas, j’en prenais une autre, tout simplement et puis encore une autre. Et aujourd’hui, cela me sert très bien dans le développement de ma marque. Les difficultés étaient nombreuses. Il y avait le prix de mon produit qui était élevé par rapport à ma cible. Il ne faut pas être trop gourmand au début », recommande-t-elle. Portée sur la qualité et l’innovation, Fadilatou Damala reconnait que sa tendance et son ouverture sur le numérique ont contribué à la visibilité et à l’essor de sa marque dans le monde entier.

 

Développement de l’industrie textile à l’ère du numérique

 

Avec pour ambition première de faire perdurer le wax en retranscrivant les motifs africains sur de nouvelles matières fluides comme de la soie sur du wax autre que le coton, la femme entrepreneure dit permettre ainsi à toutes les générations de continuer à porter le wax. Aussi reconnait-elle que certes, en plus de son business plan et de son innovation dans le secteur, elle a dû s’appuyer sur le numérique pour se construire une autre notoriété autour de sa marque. « Le numérique nous aide beaucoup et on n’a plus forcément besoin de moyens colossaux pour démarrer », admet-elle. Mieux, dira-t-elle que la crise pandémique a réduit son chiffre d’affaires. Elle a dû s’adapter au numérique pour faire du chiffre, alors que plusieurs de ses boutiques étaient pratiquement vides du fait des mesures barrières. « Avec la Covid-19, on a vu l’importance du numérique dans notre secteur, puisque c’est grâce à cet outil que nous avons pu tenir pendant cette crise sanitaire. Tout devait se faire en ligne pour écouler le stock. Aujourd’hui, en plus d’avoir une boutique, il faut se donner de la visibilité, se faire connaitre. Le numérique permet d’avoir des clients partout à l’international. Nous livrons dans différents pays d’Europe et aux États-Unis grâce au numérique », indique-t-elle. En outre, consciente des retombées positives du numérique sur son secteur, elle s’est dotée d’un site internet, d’un site de e-commerce et est présente sur tous les réseaux sociaux. Aussi fait-elle appel à des influenceurs pour mieux vendre ses créations. « J’ai misé au départ sur le bouche-à-oreille pour imposer ma marque, mais ce système ne peut plus trop bien fonctionner, vu que tout se passe sur le numérique et les réseaux sociaux. C’est un outil très important. Nous avons aussi un site internet, une boutique en ligne et nos clients s’y approvisionnent. Je vais aussi vers les influenceurs », indique-t-elle.

 

Main tendue aux jeunes créateurs

 

Présente dans neuf pays d’Afrique, la marque Fadi Wax, selon sa fondatrice, ambitionne d’encourager et d’aider les jeunes créateurs à avoir plus de visibilité. C’est pourquoi, apprend-elle qu’elle a ouvert à Biétry, deux grandes galeries dans lesquelles elle expose en plus de ses produits, les vêtements de jeunes créateurs. « Le textile ne peut pas se vendre sans le prêt-à-porter. C’est un échange entre ma marque et les créateurs. J’ai eu besoin des créateurs pour valoriser mon produit et je leur tends la main en leur offrant un espace pour vendre leurs créations, se faire connaitre et permettre aussi aux clients de venir dans un seul espace et avoir la possibilité de rencontrer différentes marques, au lieu de se rendre individuellement chez chacun de ces créateurs. J’ouvre ma porte aussi aux jeunes créateurs que j’expose pour leur permettre d’avoir de la visibilité. On a un contrat de partenariat gagnant-gagnant depuis trois ans », explique-t-elle. Et pour elle, cette vision de l’industrie textile lui permet de bien s’en sortir. « Je m’en sors super bien. Nous n’arrêtons pas de grandir. Cette année, nous avons étendu la galerie. Nous avons des projets pour d’autres pays », rassure celle qui emploie aujourd’hui 80 jeunes pour ses boutiques et ses franchises. 

Mariée, Fadilatou Damala dit ne rien regretter de son parcours qui, à l’en croire, est inspirant et fort de belles expériences. Pour y arriver, elle dit avoir fait beaucoup de sacrifices. « J’ai fait beaucoup de sacrifices dans ma vie personnelle. Je suis contente aujourd’hui, parce que j’avais envie d’être là où je suis et j’irai encore plus loin », se réjouit-elle. Elle se définit comme une femme discrète, sobre, attachée au travail et souhaite avoir une usine de production à Abidjan pour imprimer sa marque de textile.  

 

Philip Kla

 

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