Aujourd’hui, mardi 29 octobre 2024, est un jour mémorable pour mademoiselle Badjo Jeanne Laetitia LOBA. La raison, après plusieurs années de privations et de sacrifices de tous genres, l’aspirante au Doctorat s’est présentée, dans la matinée, devant le jury pour l’évaluation de sa thèse, un travail de longue haleine. Portant sur le sujet : « Littérature de jeunesse et identités de genre : représentations interculturelles et réceptions par les albums de Côte d’Ivoire et d’ailleurs », cette thèse lui a permis, lors de la présentation des résultats de ses recherches, de relever la problématique des inégalités du genre qui constitue une question majeure de la société actuelle. Or, dans la pratique, il y a des actions qui sont menées, chaque jour, pour promouvoir l’égalité entre l’homme et la femme.
« Malgré les nombreux efforts entrepris par les institutions, l’égalité de genre tant prônée, peine à se réaliser. Le constat de cette asymétrie se fait également dans les livres pour enfants, qu’on pourrait qualifier de "contemporains", parce que publiés dès l’an 2000, période marquée par le triomphe de l’idéal égalitaire, de la démocratie, de la liberté pour tous. En effet, on retrouve dans ces livres contemporains, un monde sexué et inégalitaire au niveau de la distribution des rôles de genre », a souligné la candidate au Doctorat.
Pour mieux analyser cette question autour de laquelle s’articule son travail, elle a alors noté qu’elle soulève le problème de « la survivance des inégalités de genre dans une société "évoluée" prônant l’égalité des conditions ». Un problème qui pose à son tour, la question principale de recherche suivante : « Comment s’explique la persistance de la vision inégalitaire basée sur le genre dans des albums « contemporains » ?
Dans cette dynamique, de l’objectif (y compris les objectifs spécifiques), en passant par la présentation de la pertinence du corpus, aux méthodes d’analyse, Badjo Jeanne Laetitia LOBA a relevé les résultats de ses recherches, notamment la classification des objets symboliques et culturels de l’enfance. « Façonnée par le genre, l’illustration des objets et autres activités ludiques contribuent à transmettre des normes différenciées. Les jouets de filles sont dans ce contexte orientés vers des rôles envisagés comme celui de maman. Par contraste, les jouets des petits garçons apparaissent plus ludiques et davantage tournés vers la compétition. La distribution des rôles, des fonctions, des caractères ou de l'espace laisse entrevoir l’organisation traditionnelle du genre », a-t-elle souligné.
Poursuivant, elle a indiqué que dans la littérature de jeunesse actuelle, les genres masculin et féminin adoptent des attitudes anticonformistes, créant ainsi une déconstruction même du genre. « À côté de ces images communes, se retrouvent des albums qui tendent vers un dépassement des modèles. La littérature de jeunesse contemporaine voit émerger des personnages anticonformistes qui réinventent la figure de la jeune fille et du jeune garçon. Ainsi, les filles franchissent les territoires supposés masculins, tandis que la masculinité virile est déconstruite à travers certains albums. On assiste, de ce fait, à une véritable remise en cause du modèle traditionnel et normatif qui passe par quelques aspects significatifs : le style vestimentaire, le refus du mariage, une opposition aux rôles conservateurs, la pénétration des territoires masculins par les filles et inversement », a-t-elle soutenu.
Cette présentation, faut-il le souligner, a été approuvée par les membres du jury, lors de leurs prises de parole. À travers des échanges enrichissants avec l’impétrante, ils ont relevé la valeur du travail, en notant quelquefois, des limites, indiquant que toute œuvre humaine n’est pas parfaite.
Kouassi Yao Euphrasie promeut l’égalité entre les genres
Invitée en tant qu’experte des questions du genre et membre du jury à cette soutenance de thèse de Doctorat, Kouassi Yao Euphrasie, Titulaire de la Chaire UNESCO « Eau, Femmes et Pouvoir de Décisions », a fait la promotion de l’égalité entre l’homme et la femme, en annonçant une information de taille.
« Avant de commercer, je voudrais vous annoncer une bonne nouvelle. La Côte d’Ivoire, depuis 2023, est la championne d’Afrique en matière de lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes. On est non seulement champion en football, mais aussi, on est champion en égalité de chances entre les femmes et les hommes. Ce qui veut dire qu’il y a tout en Côte d’Ivoire. Actuellement, nous parcourons le monde pour informer les autres populations en leur disant comment on a procédé pour atteindre ce niveau de lutte contre les inégalités. Le genre est une question de développement, sociologique, scientifique, économique », s’est-elle réjouie, ajoutant que dans cet élan, toute la population qui doit s’y impliquer pour obtenir un impact plus positif.
Et d’ajouter : « Le genre est une approche de développement ou une stratégie qui vise à corriger les inégalités sociales (santé, éducation), économiques (opportunités pour les hommes et les hommes), politiques (qui prend les décisions ? Comment les rôles sont repartis entre les deux genres ?), culturelles ». Selon elle, cette approche du genre permet alors d’améliorer les conditions de vie et de travail de l’homme et de la femme dans la société. Indirectement, il ressort que le genre contribue à relever les injustices, les discriminations. Il va sans dire qu’il est nécessaire de maîtriser les outils et les méthodes pour mieux dresser les questions liées au genre, en vue d’apporter des solutions idoines pour assurer l’égalité. L’une des étapes essentielles dans cette lutte, a souligné l’agent de développement Kouassi Yao Euphrasie, reste alors la recherche des sources des inégalités, tout en allant en profondeur pour les corriger convenablement. Pour ce faire, il ne faut pas perdre de vue, n’a-t-elle pas cessé de répéter, nos valeurs, nos connaissances.
« Je remercie le Doyen de l’UFR LLC et les membres du jury de m’avoir associée à l’évaluation de cette thèse de Doctorat. Nous croyons que c’est à travers la langue et la littérature que nous allons pouvoir nous démarquer pour régler les questions du genre en Côte d’Ivoire et en Afrique », a-t-elle conclu, indiquant ainsi l’importance de la littérature dans la mise en œuvre des programmes de société.
Rappelons qu’à l’issue de la soutenance, le jury a validé la thèse de la candidate en lui attribuant la mention « Très honorable à l’unanimité du jury ».
Raymond Yao