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Culture/ Interview/Mareshal Zongo (Comédien, humoriste, membre du Comité artistique international du MASA)

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 « Je suis victime du personnage de Zongo »

 

À quelques heures de la fin de la 12e édition du Marché des arts et du spectacle d’Abidjan (MASA), Mareshal Zongo, membre du Comité artistique international du MASA, s’est confié à L’Avenir. L’organisation, la nouvelle vision de la direction générale, les artistes sélectionnés, l’avenir de l’humour en Côte d’Ivoire…, le binôme de Tao nous en parle sans faux- fuyant.

 

 

La 12e édition du Marché des arts et du spectacle d’Abidjan (MASA) s’est ouverte le samedi 05 mars 2022 au Palais de la Culture de Treichville. Quelles sont vos premières appréhensions sur les débuts de ce grand événement culturel ?

On apprécie tous déjà ce qui se passe. Il faut aussi souligner qu’il y a deux grands aspects au niveau du MASA. Il y a d’abord, l’aspect de celui qui vient découvrir sur place et le second aspect, ce sont tous les efforts mis en place pour que tout se passe bien. Quand en amont, vous participez à plusieurs réunions qui étaient d’abord axées sur la théorie et qu’aujourd’hui, on découvre la pratique, cela fait plaisir dans un premier temps. Toutefois, on continue de regarder et d’observer jusqu’au samedi 12 mars 2022. On espère donc que tout se passera comme on l’a prévu.

 

Cette édition suscite beaucoup de grincements de dents et d’aprioris sur l’organisation. Êtes-vous convaincu que l’organisation sera à la hauteur quant à offrir un MASA de qualité pour cette première du nouveau Directeur général ?

Une chose est sûre, on a un MASA qui se déroule. L’autre chose, c’est qu’on a une nouvelle direction générale qui fait sa première grande expérience et qui, à ma connaissance, n’était pas en relation directe avec l’ancienne équipe du MASA. C’est en clair, une équipe qui fait sa propre expérience et il va sans dire qu’obligatoirement, il y aura des difficultés, de l’apprentissage et des réalités auxquelles on se trouve confronté sur le terrain. C’est donc tout ceci mis ensemble qui engendre tous ses petits couacs qu’on observe çà et là sur le terrain. Beaucoup de choses ont donc changé et donc, nous observons jusqu’à la fin, avant d’apprécier objectivement si la voie empruntée par la nouvelle direction générale était la bonne ou non.

 

Sur le côté artistique, vous, en votre qualité de membre du Comité artistique international (CAI), pensez-vous vraiment que les artistes sélectionnés sont assez pointus pour être à l’affiche de cette édition ?

Bien sûr ! Le monde fuse de talents, donc les artistes, il y en a toujours. Et comme vous le dites, la question qu’on se pose tous, est de savoir si les artistes sélectionnés sont les meilleurs. Une chose est sûre, ce sont ceux qui postulent au MASA qui sont sélectionnés. Le MASA, comme tous les festivals d’ailleurs, il y a ceux qui viennent profiter du festival et ceux dont le festival profite de l’image. Par exemple, lorsqu’on invite un groupe comme Magic System à l’ouverture du MASA, c’est bien le MASA qui profite de la notoriété de Magic System. Cependant, tous les artistes qui ont un certain level, ont besoin d’être dans le MASA, parce que c’est un marché qui leur permet de se faire acheter leurs œuvres par des tourneurs et des diffuseurs. Très sincèrement, je pense que nous avons une bonne sélection dans les neuf disciplines artistiques.

 

La volonté affichée de vouloir rendre beaucoup plus populaire et festif le MASA, ne va-t-il pas à la longue, faire disparaître l’essence même de l’événement ?

C’est justement là où il vous revient vous, journalistes, d’attirer l’attention de la direction générale du MASA, parce qu’entre ce qui était et ce qui est en train de se faire, il y a un grand fossé. À un moment, nous devons nous asseoir pour réfléchir sur où le MASA veut véritablement aller. À côté de cela, nous sommes pris dans l’engrenage des nouveaux médias. Lorsque le MASA naissait, il n’y avait pas Internet et du coup, nous sommes obligés aujourd’hui, de prendre en compte cette nouvelle donne. C’est d’ailleurs, la raison pour laquelle des gens sont invités aujourd’hui, au MASA, parce que très suivis sur les réseaux sociaux. D’autres sont devenus des artistes incontournables aujourd’hui, parce qu’ils ont des vues sur Facebook. Il revient, à mon sens donc, au MASA de s’adapter à tout cet environnement. L’aspect marché demeure et cela se voit dans la programmation avec l’arrivée à Abidjan de plusieurs acheteurs. Il m’arrive même de me dire qu’il y a souvent, plus d’acheteurs que d’artistes. L’aspect marché, je puis vous rassurer, existe encore, car sans cet aspect, le MASA n’a plus droit d’exister.

 

Pour vous qui êtes humoriste, quelle place occupe votre secteur dans le MASA ?

L’humour fait partie des arts qui ont fait leur entrée en dernier moment, dans le MASA. Mais, je pense que si cette nouvelle équipe, avec sa vision, n’avait pas réduit le nombre d’humoristes invités, l’humour a toujours été présent depuis son entrée. D’ailleurs, pour cette édition, tous les soirs, il y a deux spectacles à l’Institut Goethe avec des humoristes venus du Cameroun, du Gabon, du Congo et évidemment, de la Côte d’Ivoire. Le vendredi 11 mars 2022, nous avons la grande nuit de l’humour qui va faire une rencontre entre les humoristes invités et d’autres humoristes ivoiriens.

 

Depuis pratiquement trois éditions, un prix CEDEAO récompense les meilleurs humoristes au MASA…

Effectivement, la CEDEAO a initié un prix pour accompagner les jeunes humoristes et les slameurs. À chaque édition, un jury qui n’est connu à l’avance, attribue les prix. Ne sont seulement concernés par ce prix que les artistes qui sont dans le MASA, peu importe qu’ils soient dans le In ou le Of. Les prix sont décernés dans la matinée avant la cérémonie de clôture.

 

Quels sont les humoristes ivoiriens qui se sont déjà vu décerner ce prix ?

Pour la première édition, c’est Président Veskaye qui a remporté le prix. La seconde édition a été remportée par Philomène Nanema du Burkina Faso et là, nous attendons de connaître le lauréat de cette 3e édition. Il faut dire que ce prix existe déjà au FESPACO. Nous sommes sur le point d’avoir un jury permanent pour les éditions à venir.

 

Vous pensez que l’humour ivoirien est encore compétitif ?

L’humour ivoirien est très compétitif, parce qu’il a la chance d’être très médiatisé. Nous avons des monuments comme Adama Dahico qui a abattu un gros travail au service de l’humour ivoirien et facilite la tâche à beaucoup de jeunes. Malheureusement, à notre époque où régnaient Adama Dahico, Zongo et Tao, on n’avait que pour seul média, la RTI. L’humour évolue, mais la seule chose que nous demandons aux jeunes humoristes, c’est de sortir des blagues du patrimoine. De fait, les blagues du patrimoine, ce sont les mêmes blagues qui se retrouvent un peu partout. Il faut que les jeunes humoristes commencent à écrire leurs histoires.

 

Vous semblez avoir abandonné votre binôme Tao ?

Tao va super bien. D’ailleurs, nous sommes en train de travailler sur un spectacle « Immigration kabaco » ou encore « Les larmes de l’immigration clandestine ». C’est un sujet pertinent et d’actualité. La diffusion sera faite dans le courant de cette année. On voit que ceux qui sont ici, accusent ceux qui partent et vice versa.

 

Pour vous, quel humoriste peut être pris comme exemple en Afrique ?

Tout dépend du regard et je ne pense pas avoir le meilleur regard. Toutefois, s’il y a un type d’humour qui est aujourd’hui, très prisé en Afrique, c’est l’humour ivoirien. Vous verrez que dans toutes les grandes émissions et productions d’humour, on y retrouve toujours, forcément, des Ivoiriens. Tout cela est connu de tous, mais est-ce que cela veut dire que l’humour ivoirien est forcément le meilleur ? C’est une autre paire de manche.

                                                                                    

Qu’est-ce qui fait selon vous, l’attrait ou la spécificité de l’humour ivoirien ?

En Côte d’Ivoire, on compte 20 millions d’humoristes sur les 26 millions d’habitants. L’humour fait, en fait, partie du quotidien ivoirien. Les Ivoiriens ont la facilité de tourner en dérision tout ce qui est grave. On joue avec tout et ce n’est pas dans tous les pays africains que les gens rient beaucoup. En Côte d’Ivoire, les gens rient beaucoup.

 

Comment s’est faite votre collaboration avec Akissi Delta qui a abouti à votre entrée dans son téléfilm « Ma grande famille » ?

C’était une belle expérience de participer à « Ma grande famille ». Mon entrée dans ce téléfilm m’a énormément fait plaisir, parce que pendant longtemps, j’ai été victime du personnage Zongo que j’ai créé. Le Zongo qui imite le langage burkinabè. Beaucoup de gens et même des confrères artistes, étaient convaincus que je ne pouvais ou je ne savais que camper ce seul rôle. Je suis pourtant, comédien à la base. Mais comme le personnage a eu un grand succès, les gens ont verrouillé leur esprit, au point que c’est lorsqu’ils ont besoin d’un burkinabè qu’on me faisait appel. Il a fallu que je rencontre Akissi Delta pour le lui dire.

 

 

Philip KLA

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