Interview/
Dr Arthur Kanganga (médecin néphrologue)
« L’hypertension entraîne la cécité »
Dans cette interview, le médecin néphrologue Arthur Kanganga, explique la manière dont la maladie survient, ses conséquences et les traitements administrés.
Qu’est-ce que l’hypertension artérielle ?
Appelée communément la tension, l’hypertension artérielle se définit comme l’élévation des valeurs normales de la tension régnant sur les parois des artères. Comme vous pouvez l’imaginer, tout être humain vivant est doté d’une pression artérielle, car elle est la force avec laquelle le sang circule dans tout notre organisme. Elle peut être mesurée grâce à un appareil appelé tensiomètre. Son élévation est un danger, car elle peut endommager le fonctionnement de certains organes tels que le cerveau, le cœur, le rein, les yeux et les artères elles-mêmes. Ce qui en fait un facteur de risque de survenue d’accident cardiovasculaire. C’est donc un problème de santé publique. Les valeurs normales de la tension doivent être inférieures à 140/90mmHg quel que soit l’âge.
En termes simples, comment cela se passe-t-il ?
Le sang circule dans notre organisme grâce à un vaste réseau de distribution appelé le système cardiovasculaire. Il est comparable au réseau qui distribue de l’eau dans notre ville. L’eau que nous recueillons au niveau de notre robinet provient d’une source d’eau (rivière ou autre) d’où elle est extraite et après une purification chimique, elle est stockée dans un château d’eau. C’est de là que partira un réseau de canaux et de tuyaux qui serpentent toute la ville. D’abord, de gros calibres, ces tuyaux diminueront progressivement pour atteindre la forme de celui du robinet qui apporte de l’eau propre à la consommation dans nos ménages.
Où se situe alors le problème ?
La tension artérielle étant le reflet de la pression régnant dans le système cardiovasculaire pendant ou en dehors des contractions cardiaques, toute variation d’un des composants du système pourra entraîner une perturbation de celle-ci. Elle dépendra de la fréquence à laquelle battra le cœur, du volume de sang à transporter, de la résistance qui règnera dans les artères. Lesquelles artères sont à l’origine d’une force qui s’oppose à l’écoulement du sang, sous l’influence des systèmes neuro-hormonaux sur les 3 premiers éléments cités.
En clair, une élévation de la fréquence cardiaque ou de la quantité de sang à transporter dans les artères, ou encore une élévation des résistances périphériques des artères, entraînera de facto, une élévation de la tension artérielle, donc une hypertension artérielle.
Quels peuvent être les facteurs à l’origine de ce trouble ?
Le système cardiovasculaire fonctionne sous la dépendance d’autres systèmes tel que le système nerveux central. Mais plusieurs facteurs peuvent influencer chaque composante du système et entraîner une hypertension artérielle. Voyons-les en fonction du composant du système atteint. Le cœur : c’est l’organe par excellence d’expression de nos sentiments. Il peut être influencé par un stress intense lié à un choc psychologique, émotionnel ou au manque de sommeil. Il peut être aussi influencé par une consommation abusive d’excitants tels que le tabac, le café, la drogue, etc.
Il y a, en plus du cœur, une stimulation cardiaque provenant du système nerveux qui peut entraîner une élévation de la fréquence cardiaque. Cela débouche sur l’hypertension artérielle.
Le volume de sang circulant : ce volume est estimé à 5 litres dans l’organisme humain. Une consommation abusive de sel dans notre alimentation va entraîner une augmentation du volume d’eau dans le sang circulant. Cela, par le simple principe qui veut que l’eau suive le sel. Par conséquent, une élévation du volume sanguin entraînera une élévation de la tension artérielle.
Les artères et les veines : elles ont la capacité en cas de nécessité sous l’effet de certaines hormones, d’augmenter leur diamètre : c’est la vasodilatation ou alors de se rétrécir, la vasoconstriction. La sécrétion par le rein d’une hormone appelée la rénine, va entraîner une vasoconstriction, synonyme d’élévation de la résistance périphérique qui va susciter une élévation de la tension artérielle.
Comment se présentent alors les signes de l’hypertension
artérielle ?
L’hypertension n’apparaitra que lorsque les moyens de compensation initiés par l’organisme seront dépassés. Elle va alors se propager sur tous les vaisseaux sanguins chargés d’apporter l’oxygène et les nutriments aux organes. L’accélération de la vitesse de circulation du sang aura pour effet de perturber les échanges d’oxygène et de nutriments entre le sang et les cellules des organes. Ce qui se matérialisera par certains signes qui pourront motiver une consultation.
Au niveau de la tête, ce sont des céphalées ou maux de tête dits en casque, car ils prennent toute la surface de la boite crânienne. Parfois, ils se manifestent par une sensation de lourdeur de la tête ou une tension au niveau de la nuque. On note aussi un flou visuel caractéristique qui donne l’illusion de voir les mouches voler. Il y a des bourdonnements des oreilles donnant l’impression de passer en dessous des lignes électriques de haute tension. Concernant le cœur, les signes se manifestent par des palpitations, une sensation du cœur qui bat trop vite et s’emballe et une douleur thoracique.
En général, l’hypertension est découverte de façon fortuite au cours d’une prise de tension, lors d’un examen banal de routine. C’est dire qu’elle peut passer longtemps inaperçue et n’être découverte qu’au moment des complications. C’est pourquoi, elle est appelée le tueur silencieux.
Quelles sont les conséquences de l’hypertension artérielle ?
Les conséquences à court terme sont les accidents vasculaires cérébraux (ischémiques ou hémorragiques). À long terme, l’hypertension artérielle peut provoquer une augmentation pathologique du cœur, c’est la cardiomyopathie. Elle peut aussi entraîner la cécité, l’insuffisance rénale et des paralysies liées aux accidents vasculaires cérébraux.
Que faut-il faire pour l’éviter ?
Ne pas céder à la panique. Il faut se faire dépister par la prise de la tension artérielle dans un cabinet de soin, à l’aide d’un appareil appelé tensiomètre ou phygmanomètre. Adopter également un nouveau style de vie comprenant : une alimentation saine (moins de sucre et de sel), faire de l’activité physique et contrôler son bilan lipidique.
Existe-t-il un traitement ?
L’hypertension artérielle étant une maladie liée à une modification de la structure des parois artérielles, une guérison complète signifie un remodelage de celles-ci. Chose qui ne se fait pas souvent. C’est pourquoi, l’on dit « qu’on traite, mais on ne guérit pas de l’hypertension artérielle ». Ce qui en fait d’ailleurs, une maladie chronique au même titre que le diabète. Des traitements existent actuellement. Ils ont pour but de normaliser la tension artérielle afin d’éviter la survenue des complications irréversibles regrettables. Il existe des comprimés, des médicaments de prise orale qui sont bien codifiés pour chaque stade de la maladie.
Par Ernest Famin
Photo légendée : Dr Arthur Kanganga, médecin néphrologue, donne des conseils pour éviter l’hypertension artérielle
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